L’art funéraire

Jusqu’aux années 1960, les habitants de Saint-Philbert de Bouaine formaient une véritable communauté, avec des amitiés ou des haines, mais jamais sans indifférence. A l’occasion d’un décès, tout le monde se sentait concerné.

La fin de vie

Quand l’état de santé d’une personne annonçait sa fin proche, la présence d’un prêtre était requise généralement. Alors, le curé ou son vicaire se déplaçait à son chevet pour lui porter l’extrême-onction. Il s’habillait d’une cape noire et partait avec une petite valise contenant le Saint-Sacrement. Du fait du caractère sacré de sa démarche, il était précédé d’un enfant de chœur en aube qui agitait une clochette de manière à ce que les passants rencontrés se recueillent à leur passage.

L’information du décès

Après le dernier soupir du mourant, son entourage se devait d’en informer toutes les familles philbertines.
Cela passait par le canal religieux avec la sonnerie du glas. Elle était précédée par quelques coups de cloche dont le nombre signifiait le sexe de la personne défunte (six pour une femme, neuf pour un homme).      Le second canal de diffusion était l’information directe du jour et de l’heure de la sépulture. Pour cela, la famille faisait appel aux voisins et amis. Elle partageait le territoire communal en zones qu’elle affectait à chacun des messagers choisis. Ceux-ci se déplaçaient dans tous les foyers pour porter la nouvelle. C’était l’occasion d’évoquer la mémoire du disparu ou de la disparue. La visite se terminait souvent à la cave. C’est dire si les tournées étaient « éprouvantes ».

La veillée funèbre

En attendant la sépulture, le corps reposait dans un lit à son domicile. Il était veillé jour et nuit par ses proches, renforcés par leurs connaissances. Quelques personnes apportaient leur chapelet et l’égrenaient en silence. Au contraire, d’autres étaient volubiles, évoquaient les joies et les misères du mort ou de la morte et finissaient par échanger les potins du moment. Les nuits étaient longues car il ne fallait pas se laisser gagner par le sommeil.

Cette période servait aussi à accomplir les préparatifs de la sépulture : missionner le fossoyeur communal, commander le cercueil à un des menuisiers locaux, contacter un voisin pour mener le corbillard avec son cheval…

La sépulture

Le jour de la cérémonie, après la mise en bière, le corbillard depuis 1932 venait charger le cercueil et partait vers l’église au même pas que le cheval, suivi de la famille et des voisins à pied ou en voiture à cheval. Le convoi grossissait au long du chemin.

 

Dans l’église, des porteurs emmenaient le cercueil du corbillard jusqu’au pied de l’autel. La cérémonie se déroulait selon le paiement effectué par la famille du défunt à laquelle il était proposé trois classes, de la plus humble à la plus fastueuse. Les différences s’observaient dans le cérémonial : les cloches, les chants, la croix de procession, les bannières… Depuis la séparation de l’Église et de l’État, la paroisse avait besoin de financement.

A la fin de l’office, le corps reprenait sa place dans le corbillard. Le convoi s’organisait avec la croix en tête, le prêtre entouré des enfants de chœur, le corbillard, les proches du défunt et enfin la foule des personnes présentes. La première halte s’effectuait dans le cimetière, au pied de la croix centrale, pour une ultime prière commune suivie d’une bénédiction du cercueil. Ensuite le cercueil était porté pour l’inhumation dans le carré creusé par le fossoyeur communal.

Une grande partie de cette assemblée se retrouvait une semaine plus tard pour la messe de huitaine suivie d’une visite au cimetière.

Les riches sépultures des concessions à perpétuité bordent essentiellement l’allée centrale en montant vers la croix centrale puis la statue de la Vierge. Les monuments diffèrent beaucoup mais ont des valeurs patrimoniales ou historiques. Autour de la croix centrale se répartissent les sépultures des prêtres.

Cette croix funéraire en granite est la sépulture de l’abbé Jean Chateigner, curé de la paroisse de 1901 à 1934. On lui doit notamment la richesse des bulletins paroissiaux.
Comme il était Chevalier du Saint-Sépulcre, la croix potencée rappelle la croix du royaume de Jérusalem.

Le monument en granite est surmonté d’une croix nimbée à branches évasées (abbé Robin curé de 1830 à 1857).

La dalle en granite comprend une croix latine en relief (abbé Palvadeau curé de 1870 à 1877).

Cette dalle en granite accueille les sépultures de l’abbé Paboeuf décédé en 1866 et de l’abbé Déliré décédé en 1962.

Cet édicule en granit est accompagné de mobilier en bronze : plaque portant le nom de famille, corbeille en face avant et deux flambeaux latéraux.
Famille BRIAU du Gué-Bisfou . Il est inspiré du tombeau de Napoléon au Panthéon.
Nom du granitier gravé en face avant : BELLANGER A ANGERS

Les spécificités de cette tombe en béton de la famille Duret sont la dalle faite de carreaux de grès de différentes couleurs et la croix en acier très travaillée (croix nimbée et tréflée).

Cette tombe faite d’un entourage en granite est surplombée par une croix dont les branches se terminent par deux crochets et une pointe. Elle est la sépulture de la famille Vignaud-Gendre, en particulier d’André Vignaud, maire de 1923 à 1947.

Ce monument de granite et de marbre est surmonté d’une simple croix latine. Y sont inhumés Auguste Hilléreau père et fils, maires de la commune, de 1900 à 1920 pour le premier, de 1920 à 1923 pour le second.

L’ensemble comprend deux édicules en granite érigés par les propriétaires de la Roche-Chotard : la famille de Labrousse – de Corbie et leurs descendances, les familles de Lyrot et de Moussac. Elles bénéficient d’une concession perpétuelle accordée par autorisation du Roi Louis-Philippe du 7 août 1842

Des plaques en bronze énumèrent les personnes inhumées.

Cet édicule de la famille PAROIS-POUVREAU est en calcaire.

Le monument de la famille Gendre est constitué de 2 tombes avec dalle de granite et d’une stèle centrale semblant provenir de l’ancien cimetière. Sur la tombe de gauche, une plaque de marbre rappelle le souvenir de Eugène Gendre mort pendant la Première Guerre Mondiale.

Cette sépulture toute en granite possède une grande croix latine. Elle appartient à la famille Franchineau ; Mlles Franchineau firent don à la paroisse de terrains pour la création des écoles.

Ce monument en granite est constitué de 2 dalles, d’un édicule à l’arrière possédant une croix discoïdale sur la face et une croix funéraire nimbée au-dessus. (famille Guibert)

La dalle de granite est recouverte d’une plaque en bronze et surmontée d’une croix pattée. (famille Malécot)

Antérieurement, à l’exception des nantis, les sépultures étaient constituées d’un tumulus allongé de terre. Au-dessus de la tête du défunt était généralement posé un petit bloc de pierre surmonté d’un croix en fonte de forme latine. S’il est des modèles de croix très utilisés, d’autres sont plus rares. Divers symboles sont associés à la croix, collés à la base ou accrochés à la traverse horizontale. Le choix de ces symboles peut révéler la personnalité de la personne enterrée.

Découvrons la diversité de ces ornements avec leur signification.

Cette croix typique a reçu une peinture récente. Le minium gris est un primaire antirouille. Il assure une protection anti-corrosion durable de tous les métaux ferreux.            Un christ crucifié se détache à l’intersection du montant et de la traverse de la croix. A la base, on observe des épis de blé. C’était la marque favorite des agriculteurs. Le blé représente la vie. Il doit être coupé (suggestion de la mort) pour donner la farine avec laquelle l’homme pétrit le pain : la nourriture, le pain de la Vie, la Vie.

Dans le même bouquet, des roses s’ajoutent aux épis. La rose est la fleur des fleurs ; elle est la suggestion de l’amour et de l’amour partagé. Dans la symbolique catholique, la rose fait référence à Marie et à la virginité.

Le lierre est enroulé autour de la traverse de la croix. Il est à la fois symbole d’éternité et d’attachement. Comme tous les végétaux au feuillage persistant, il représente l’éternité ou l’immortalité.

La base de cette croix témoigne d’une sépulture d’un travailleur du métal par la présence du marteau, d’une paire de tenaille et de divers outils de ces professions.

Cette croix orne la sépulture d’un enfant. L’ange est le messager de Dieu, l’exécuteur de la volonté divine. Pleurant ou alangui, l’ange exprime le chagrin lié à la disparition de l’être cher. La rose est représentée en couronne. Notons le brelage qui désigne le cordon qui attache les deux branches de bois de la croix.

La poignée de main symbolise la fraternité (Francs-maçons), la foi (catholique) ou l’alliance (laïc).

La tombe à enclos ou clôture correspond à la notion ancestrale de séparation de l’espace sacré du monde profane. L’enclos délimite ainsi un espace sacralisé symbolisant le jardin céleste, le paradis.

Les deux rameaux d’olivier au-dessus du Christ représentent la paix.

Bien d’autres symboles peuvent être observés sur les croix. Ils constituent des témoignages des hommages et des vertus attribués aux défunts. En voici quelques exemples à découvrir en circulant entre les tombes.

Le tournesol rappelle le soleil, le symbole universel de lumière, d’amour et de rayonnement. Il exprime l’amour porté au défunt.

© Bouaine Patrimoine
Contributions : Pierre Parois
Rédaction : Jean-Pierre Morisseau

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